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Délinquance ou taxe carbone: ça bavarde en Sarkofrance

Publié le 03 septembre 2009 par Juan

Délinquance ou taxe carbone: ça bavarde en Sarkofrance
Mercredi 2 septembre, Nicolas Sarkozy a cru bien faire, pour son image, en s'invitant par surprise à la réunion organisée par son ministre de l'Intérieur place Beauveau sur la sécurité. Son "collaborateur" de Matignon a cru bien faire en clarifiant les modalités de la future taxe carbone.
Sarkozy bavarde sur la sécurité
Au siège du ministère de l'Intérieur à Paris, Brice Hortefeux avait réuni des directeurs départementaux de la police et de la gendarmerie. Les chiffres d'insécurité deviennent si mauvais (+4,3% d'atteintes aux personnes à fin août, +12% de cambriolages sur un an), qu'ils en deviennent encombrants. Sans prévenir, Nicolas Sarkozy s'est invité, traversant à pied, et devant les caméras et journalistes qui font l'habituel pied de grue devant l'Elysée. C’est «un discours très lucide, très ferme que j’ai tenu et je me suis engagé sur des résultats, ces résultats, vous verrez, nous les aurons»". Le même jour, le Conseil d'Etat annulait le décret autorisant l'équipement et l'utilisation du pistolet Taser par les polices municipales, publié voici un an. Cette nouvelle réjouira ceux qui fustigent les dangers de cette arme à décharges électriques. D'après le Conseil d'Etat, le mauvais décret pêchait par l'absence de "procédure d'évaluation et de contrôle périodiques" et de "précautions d'emplois". Côté insécurité, la mise en scène élyséenne témoigne de l'agacement présidentiel sur les mauvais résultats de sa politique contre la délinquance: une douzaine de lois depuis 2002, des déclarations à l'emporte-pièce.
La veille, Brice Hortefeux parlait prévention et rapport avec la jeunesse. Hortefeux jouait compassion, ouverture et dialogue. Dès le lendemain, le masque était tombé. Tout ceci n,'était que bavardages et vacarme. Interrogé sur la riposte du préfet Girod de Langlade, Brice Hortefeux, pourtant ministre de tutelle, a eu la réponse cinglante : "no comment, pauvre homme". Le préfet avait été mis à pied par Hortefeux il y a une semaine suite à des accusations de déclarations racistes à l'encontre d'une employée d'aéroport, accusations qu'il avait niées. Il avait ensuite déclaré que son ministre se faisait une image d'antiraciste à bon compte sur son dos. Autre "anecdote", le ministre de l'intérieur a également porté plainte contre des habitants de Bagnolet, qui ont accusé la police d'être responsables de la mort d'un jeune il y a quelques jours. "La procédure est rare" note le Figaro.
Les médias aussi n'ont mis que quelques heures pour souligner combien la ficelle du dialogue était grosse: l'hôte de l'Elysée fut le premier, dès 2002, à stigmatiser la jeunesse des banlieues, jusqu'aux émeutes de novembre 2005. Dans le discours, volontairement provoquant (du "nettoyage au Karchër" aux "Racailles" des banlieues, sans parler de la boulimie législative anti-jeunes telle les récentes lois anti-bandes et anti-cagoule) comme dans les actes (supression de la police de proximité, abaissement à 16 ans de l'âge de majorité pénale), Nicolas Sarkozy fut largement responsable de la dégradation des relations entre la police et la jeunesse... au grand dam des forces de l'ordre. Sarkozy a senti le vent du boulet. Sa politique de lutte contre la délinquance ... est un échec. Faut-il encore des preuves ? «On va faire un effort considérable sur la vidéo surveillance, un moyen moderne de protéger les Français, et je souhaite qu’on donne davantage de moyens à la police technique et scientifique, avec le travail sur les fichiers pour l’analyse sérielle des criminels» a expliqué mercredi Nicolas Sarkozy. Il attend des résultats dès septembre. Il va attendre.
Fillon flingue la taxe carbone
Mercredi 2 septembre, François Fillon a clarifié les modalités de la taxe carbone (dans une interview publiée samedi dans le Figaro Magazine). Elle sera trop modeste pour efficace, trop élevée pour être indolore, mal compensée pour être juste. Ceux qui critiquaient la "démagogie" de l'opposition depuis quelques jours sur le sujet en seront pour leurs frais. Fillon a en effet annoncé que "son" gouvernement installerait cette nouvelle taxe à 14 euros la tonne de carbone, un niveau inférieur de moitié au seuil recommandé par Michel Rocard: «Nous avons décidé d'appliquer de façon progressive cette taxe. En partant du prix de la tonne sur le marché, soit 14 euros. Ensuite, nous mettrons en place une commission indépendante chargée de mesurer les effets de la politique mise en oeuvre et de proposer des correctifs». Quel était le sens de la proposition de Michel Rocard ? Basée sur de savants calculs, le prix de 100 euros, d'ici quelques années, a été retenu comme le prix optimal (car cher) pour décourager suffisamment la consommation des énergies fossiles concernés pour que sa baisse ait un effet sur les engagements en matière de réchauffement climatique. Le rapport Rocard recommandait donc de mettre en oeuvre la taxe à un seuil plus bas (32 euros). Quand Fillon retient 14 euros, il fusille son efficacité par avance. De surcroît, cette taxe ne concernera pas l'électricité («Si la France rejette moins de carbone que les autres pays, c'est grâce à l'électricité, elle-même très majoritairement issue du nucléaire»), comme le réclamaient les écologistes. François Fillon a également précisé les modalités de compensation: les prélèvements obligatoires n'augmenteront pas ... pour tout le monde: «Pour les entreprises, elle (la taxe) sera compensée par une suppression de la part de la taxe professionnelle qui porte sur les investissements. Les ménages, quant à eux, bénéficieront d’une diminution de la fiscalité sur le travail, soit par l’impôt sur le revenu, soit par une baisse des cotisations sociales». François Fillon prévient: «Pour nos concitoyens les plus défavorisés, des inactifs et des habitants des territoires ruraux, nous étudions en outre des mesures financières d’accompagnement. Il est hors de question d’appliquer uniformément ce dispositif à des Français qui ont le choix et à d’autres qui ne l’ont pas.» Fillon reste donc bien flou sur la compensation de cette nouvelle TVA pour les plus pauvres. Il aurait pu préciser la mise en place d'un "Chèque Vert", un dispositif largement connu, et d'ailleurs proposé par les députés Verts en avril dernier.
Quelques heures auparavant, Nathalie Kosciuko-Morizet, l'écolo de service de l'UMP, avait tenté le jour même de déminer le sujet en expliquant que la taxe carbone ne serait pas une taxe... Comprendra qui pourra.
Eric Besson parle pour exister
Le ministre de l'identité nationale s'est livré au jeu publicitaire... en faveur de la nouvelle formule de Libération (dans les kiosques lundi prochain). Mercredi, il était l'invité de France Inter. Le ministre de l'Identité Nationale... A propos des "alliances", le ministre est satisfait : "En général quand on va aux élections, on cherche à les gagner." Besson justifie ainsi l'ouverture du camp présidentiel aux souverainistes de Philippe de Villiers et aux chasseurs. Il préfère cette ouverture "à droite" aux débats Modem/PS, jugeant que l'identité socialiste serait floue. Confronté à un démographe, Eric Lebrun, Eric Besson s'agace en direct. Le premier critique l'absence de réalisme politique, économique et culturel de la politique d'expulsions du gouvernement, en soulignant l'incohérence économique des expulsions d'immigrés clandestins : face à un coût élevé (près de 20 000 euros par expulsion), Eric Besson répond que la non-expulsion coûte également très cher (??). Habile politique, Eric Besson se réfugie derrière l'action de Daniel Vaillant et Jean-Pierre Chevènement, anciens ministres de l'Intérieur avant 2002. Il refuse les critiques, notamment contre le découragement des unions mixtes, mis en oeuvre depuis 2002 ("il n'y a pas de débat"), mais ajoute: "n'y a t il pas de mariages blancs?"
Le journaliste Jean-François Aquili laisse échapper son malaise: "votre constat est vraiment anxiogène."
Ami Sarkozyste, es-tu aussi bavard ?


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