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Budget 2011 : ce qui va changer pour le contribuable

Publié le 02 février 2011 par Lecriducontribuable

Traduction depuis l’anglais, par Roman Bernard, de l’article de Vesselina Spassova « French Tax Law 2011 – what is going to change for the taxpayer », publié sur la version anglophone du site de l’Institut de recherche économiques et fiscales (Iref).

Après l’énorme augmentation des déficits publics au cours des deux dernières années, le gouvernement français annonce le début d’une ère nouvelle et promet de limiter le déficit public à 6 % du produit intérieur brut (PIB) en 2011 (contre 7,7% en 2010). Si ce 1,7 point de PIB de réduction du déficit est atteint, ce sera la première fois en 50 ans qu’un tel effort pour réduire les dépenses publiques réussit. Mais le gouvernement va-t-il y parvenir ?

Il faut en effet garder à l’esprit que le déficit public a augmenté de 4,4 points de PIB au cours des deux dernières années, et la dette publique de plus de 15%. Selon les dernières données, le montant total des dépenses du gouvernement atteint 422,5 milliards d’euros en 2010, dont 70 milliards classés comme « charges exceptionnelles » (près de la moitié ayant servi à compenser la baisse des budgets des collectivités territoriales en raison de la suppression de la taxe professionnelle, et nous ne voyons pas pourquoi les choses devraient être différentes l’année prochaine). Pendant ce temps, le déficit du système de Sécurité sociale a atteint 23,1 milliards d’euros en 2010.

À ce stade, il est facile de comprendre que toute réforme économisant de l’argent sera bonne à prendre pour le gouvernement. Par exemple, jusqu’en 2013, seul un fonctionnaire partant à la retraite sur deux sera remplacé (sauf à l’Éducation nationale, qui est le plus gros employeur). En outre, la réforme des retraites, durement attaquée en 2010, devrait permettre de réduire les déficits publics dans les années suivantes d’environ 0.5 point de PIB (son effet à long terme, toutefois, est susceptible d’être décevant et une nouvelle réforme devra être faite). En outre, le gouvernement s’engage à geler les dépenses publiques en valeur au cours des trois prochaines années, à l’exception du paiement du service de la dette et des pensions. Pour atteindre cet objectif, un ensemble impressionnant de plus de 150 mesures a été annoncé.

Le rabotage des niches fiscales

La crise économique de 2008 a suscité un débat houleux –qui a rencontré un large écho dans les médias – sur l’équité du système fiscal actuel. De nombreuses voix se sont élevées pour affirmer que le système est injuste et que les « riches » doivent être taxés plus lourdement. D’un autre côté, le gouvernement doit prendre en compte le fait que la reprise économique serait entravée si les impôts augmentaient. C’est donc la voie du milieu qui a été choisie – le rabotage des niches fiscales qui favorisent souvent les revenus les plus élevés. En effet, dans la loi de finances 2011, il existe plusieurs mesures qui abolissent ou réduisent des avantages accordés à certains contribuables.

Pour les autres allégements fiscaux, la loi introduit une diminution de 10% des crédits d’impôt ou des niches fiscales. La charge fiscale supplémentaire résultant de ces mesures est estimée à 9,4 milliards d’euros en 2011.

Impôt sur le revenu

Tout revenu annuel supérieur à 5963 euros est soumis à l’impôt sur le revenu. Le taux d’imposition est de 5,5% pour la tranche la plus basse et de 41% (40% jusqu’en 2010) pour ceux qui gagnent plus de 70 830 euros par an :

Revenu annuel (en euros)

Taux d’imposition

< 5963 0 %

596311896 5,5 %

1189726420 14 %

2642170830 30 %

> 70830 41 %

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

Le taux « normal » (19,6 %) est demeuré inchangé, mais la base est élargie. La télévision était traditionnellement soumise à un taux réduit de TVA de 5,5%. Beaucoup de gens, cependant, reçoivent désormais la télévision dans le cadre d’une offre « triple play » : Internet, télévision et téléphone. Depuis 2007, la loi stipule que le taux de TVA réduit peut être appliqué à 50% seulement de l’offre composite. Le fisc en a ainsi conclu qu’il y avait des gains à réaliser ici (près de 1,1 milliard d’euros selon les estimations). Le gouvernement a donc décidé que désormais, le taux réduit ne s’appliquera que lorsque la télévision est fournie au consommateur séparément des autres services.

Les cotisations sociales

La quasi-totalité des revenus imposables est soumise aux soi-disant « prélèvements sociaux », dont le but est de couvrir les déficits du système de Sécurité sociale (retraites, assurance-maladie, aides sociales). Il est intéressant de noter qu’il s’agit d’une « flat tax » retenue à la source. Initialement fixées à 1,1%, ces cotisations sont aujourd’hui de 12,3% avec (0,2% d’augmentation cette année), réparties comme suit:

CSG (Contribution sociale généralisée) 7.5 % sur les revenus du travail et 8.2 % sur les revenus du capital

CRDS (Contribution au remboursement de la dette sociale) 0.5 %

« Prélèvement social » 2,5 %

Contribution au RSA (Revenu de solidarité active) 1,1 %

Plusieurs des mesures de la loi de finances 2011 concernent les revenus du capital. Malheureusement pour les investisseurs et les épargnants, les nouvelles ne sont pas très réjouissantes.Taxation des revenus du capital

Certains revenus du capital sont imposés via le prélèvement forfaitaire libératoire, qui est un impôt proportionnel portant, par exemple, sur les dividendes ou les revenus de titres à taux fixe. Le taux du prélèvement forfaitaire libératoire est augmenté de 18% à 19% en 2011. Le même taux sera appliqué aux revenus d’actions; recettes qui, auparavant, étaient également imposées à 18%. Les revenus provenant de biens immobiliers seront imposés au taux de 17%, au lieu de 16% en 2010.

Curieusement, ces augmentations ne seront pas prises en compte dans le calcul du bouclier fiscal. Autrement dit, si ces impositions supplémentaires font passer le montant total des impôts payés par le contribuable à plus de 50%, le fisc ne lui fera pas bénéficier du bouclier fiscal et ne lui remboursera pas le montant dépassant les 50%.

Afin de financer le système de retraites par répartition, la loi de finances 2011 abroge le crédit d’impôt de 50% sur les dividendes distribués. Cette mesure devrait faire rentrer quelque 600 millions d’euros supplémentaires.

Une autre réforme budgétaire devrait permettre de renflouer la Sécurité sociale à hauteur de 180 millions d’euros : l’imposition des revenus du capital réalisés sur la vente de titres. Auparavant, pour chaque ménage, les 25830 premiers euros de vente de titres étaient exonérés. À partir de 2011, ce ne sera plus le cas.

Autres taxes

Les écotaxes

Cédant à la tentation de la fiscalité « verte », le gouvernement a mis en place plusieurs outils fiscaux visant à encourager certaines activités respectueuses de l’environnement. Néanmoins, le gouvernement semble réviser cette politique et plusieurs exonérations fiscales sont annulées ou réduites.

Par exemple, l’Etat encourage l’agriculture biologique, en raison de ses effets positifs sur l’environnement et, en principe, sur l’emploi, ainsi qu’en raison de la demande croissante pour ses produits (qui rend pourtant l’incitation fiscale inutile). Au cours des dernières années, le crédit d’impôt accordé à ces entreprises était de 2400 euros, majoré de 400 euros par hectare dans la limite de 1600 euros. Cette disposition est prolongée jusqu’en 2012, le crédit d’impôt étant toutefois réduit à 2000 euros à partir de cette année. En outre, le crédit d’impôt de 50% pour les investissements dans le photovoltaïque est réduit à 25%.

2011 annonce aussi la fin de la prime à la casse – un avantage donné aux gens afin de les encourager à se débarrasser de leurs vieux véhicules et de les remplacer par des nouveaux, plus respectueux de l’environnement. Cela signifie moins de dépenses publiques, mais aussi moins de recettes fiscales provenant de l’industrie automobile dans les années à venir.

Taxe  bancaire

Selon la logique de la nouvelle loi fiscale, la crise du système bancaire de 2008 a révélé l’importance du risque systémique et, pour éviter des situations similaires à l’avenir, il y a besoin d’une nouvelle taxe sur les banques. Bien sûr, on peut douter de la validité de cette logique et se demander si ce n’est pas seulement un prétexte pour augmenter les recettes fiscales à court terme. Le capital social sera taxé à 0,25%. L’idée de base est que plus les actifs de la banque seront à risque, plus elle paiera d’impôts.

Cette taxe va ajouter au budget de l’Etat environ 500 millions d’euros en 2011 et devrait lui rapporter encore plus dans les années suivantes. Elle s’ajoutera à la «taxe de surveillance» mise en place début 2010, et à la contribution « exceptionnelle » au fonds de garantie des dépôts, qui existe toujours. En 2013, ces trois taxes devraient se traduire par plus d’un milliard d’euros de recettes en plus dans le budget de l’Etat.

À quoi s’attendre pour l’avenir ?

Plusieurs réformes possibles sont en cours de discussion. La première, qui correspondrait à une stratégie ambitieuse d’harmonisation fiscale entre les systèmes français et allemand, est la suppression de l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) aujourd’hui perçu sur les biens immobiliers de plus de 790 000 euros. Une bonne décision pour l’économie française, puisque la France est l’un des derniers pays européens à prélever un tel impôt, et qui permettrait d’économiser aux contribuables environ 3,5 milliards d’euros par an. Le problème, bien sûr, c’est que le gouvernement a désespérément besoin des recettes et c’est pourquoi le ministre du Budget François Baroin et le président Sarkozy parlent déjà d’un nouvel impôt sur les plus-values réalisées sur la vente de la résidence principale.

Il y a aussi des rumeurs selon lesquelles le bouclier fiscal, jugé impopulaire, sera supprimé, ce qui en fait est déjà le cas, puisque, comme nous l’avons expliqué précédemment, la plupart des hausses d’impôt en 2011 sortent du calcul du bouclier fiscal. Il n’est cependant pas certain qu’une mesure aussi démagogique soit vraiment nécessaire. En effet, elle ne permettra à l’État de récolter que 450 millions d’euros, tout en aggravant le problème (malheureusement difficile à mesurer) de l’évasion fiscale.

Une suppression simultanée de l’ISF et du bouclier fiscal pourrait être intéressante, à condition d’abaisser le taux marginal de la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu.

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