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Gueant ou hortefeux : c4est trop tard!

Publié le 03 mars 2011 par Jfherdhuin

L’expérience malheureuse de la gauche en avril 2002 a incité Nicolas Sarkozy à faire de la lutte contre l’insécurité sa priorité dès qu’il a été installé au ministère de l’intérieur. Il était assisté en cela de Claude Guéant, son directeur de cabinet. Ce dernier était la pièce maîtresse d’un dispositif qui a servi à conquérir l’Elysée. Dès les premières grandes messes, les préfets, la police et la gendarmerie ont été réunis pour fixer un cap. Réussir à faire baisser la délinquance. Dans un premier temps, il y a eu un effet mobilisateur dans le corps policier qui éprouvait de nombreuses difficultés à mettre en œuvre une police de proximité instaurée dans la précipitation, avec des concepts doctrinaires.

Les policiers étaient embarrassés par cette police de proximité mal ficelée qui entravait leur action. Nicolas Sarkozy et Claude Guéant ont balayé celle-ci comme si elle n’était qu’un concept de gauche alors qu’il s’agit d’un mode de management initié dans les pays anglo-saxons. Très rapidement dans les services de la police nationale on a ressenti cette brutalité du langage et de l’action des hauts responsables du ministère de l’intérieur. De nombreux dispositifs qui existaient bien avant la police de proximité ont été  dévitalisés. Le partenariat avec les élus de terrain n’a jamais été dans les priorités des gouvernements de droite. C’est pourtant avec les maires que peut se construire une politique de sécurité locale. Les commissaires de police ont été contraints  de se consacrer aux pratiques centralisées d’une police de maintien de l’ordre en délaissant les objectifs locaux.

En fonction de la communication gouvernementale, on a « promené » les policiers sur les objectifs du moment. Le dernier fait divers, le dernier coup d’éclat médiatique ont défini la feuille de route des commissaires de police dont on a muselé les initiatives et ignoré le savoir-faire.

Pour obtenir des résultats statistiques, de bons chiffres, dont les médias ont été trop friands, les commissaires de police ont dû se couper d’avec leurs subordonnés. Toujours plus de chiffres, de contrôles d’identité, d’arrestations, ont conduit la police nationale à pratiquer «  le ramassage » dans de grandes opérations de police qui, au lieu de ramener le calme, inquiètent la population et provoquent immanquablement un sentiment de révolte chez les adolescents. Quant à eux, les délinquants confirmés, les trafiquants de stupéfiants, ont poursuivi leurs méfaits pratiquement indifférents à ces opérations menée à “l’aveugle”. Dans certains départements on oblige les commissaires de police à compter le nombre de cages d’escaliers visitées, comme si les fonctionnaires des brigades anti-criminalité ne savaient pas où aller. Ce chiffre a d’ailleurs été présenté par Brice Hortefeux comme résultat probant de la mobilisation des services.

C’est humiliant de faire travailler, selon des méthodes infantilisantes, des policiers de terrain, qui sont les meilleurs experts en matière de sécurité. Aujourd’hui tout repose sur des « spécialistes » issus de réseaux de l’ombre qui, le plus souvent, n’ont travaillé que dans les administrations centrales, dans les états major ou dans les grands services dotés des moyens les plus performants, dans tous les cas, loin des banlieues. La préfecture de police a marqué tout le territoire de sa conception centralisatrice. C’est en son sein qu’ont été formés les grands dirigeants de la police nationale. Mise en place en septembre 2009, la police d’agglomération, qui n’est qu’une police d’état major inspirée par les mêmes, est encore plus éloignée du terrain et de ses élus.

Depuis 2002 les préfets, les directeurs départementaux de la sécurité publique, toute la hiérarchie policière et les commandants de groupement ont été soumis à la loi du chiffre au détriment de la qualité du service public. Les statistiques de la délinquance ne reflètent pas la réalité. Depuis 2002 la délinquance n’a pas diminué et elle a même augmenté dans les rubriques les plus sensibles des atteintes aux personnes. Les chiffres donnés en matière d’atteintes aux biens, qui sont présentés à la baisse, sont les plus discutables; c’est dans ces rubriques que l’on peut aisément masquer la réalité. Je peux en faire la démonstration à partir des données de l’Observatoire National de la Délinquance et des Politiques Pénales, (dont le Président, Alain BAUER, est un proche du Président de la République) mais aussi en examinant l’état 4001 de la délinquance et son mode d’enregistrement.

Il est temps de restaurer la considération que l’on doit au corps préfectoral, aux policiers et aux gendarmes ; il ne suffit pas de les flatter et de leur dire tous les jours combien leur métier est difficile. C’est justement leur fonction et leur métier qu’il faut protéger, plutôt que de les détourner de leur engagement qui les place au service de l’Etat et de l’intérêt général.

Il est trop tard pour obtenir des résultats dans la précipitation, juste pour présenter un bon bilan avant 2012. Cet emballement sécuritaire que l’on connait depuis 2002 deviendrait encore plus dangereux et tout aussi inefficace s’il s’accélérait. On imagine les effets  dévastateurs dans notre pays, d’émeutes semblables à celles de 2005, la veille des élections présidentielles.


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