Magazine Bd

Alfred – Come prima

Par Yvantilleuil

Alfred - Come primaCe qui est bien avec les récits d’Alfred (Le désespoir du singe, Je mourrai pas gibier, Pourquoi j’ai tué Pierre) c’est tout d’abord le plaisir de savoir qu’un nouvel album arrive, puis ce sentiment de bien-être qui perdure même après avoir terminé la lecture. Vous imaginez alors mon bonheur en voyant qu’il s’attaque ici à une œuvre en solo, inspirée de son histoire familiale. Lui qui est capable de s’approprier les histoires d’autrui comme nul autre, comme en témoigne ce chef-d’œuvre où il ne faisait plus qu’un avec son ami Olivier Ka, va donc pouvoir mettre ses propres émotions en images. Il n’en fallait pas plus pour titiller ma curiosité et activer cette joie pavlovienne qui accompagne la vue de son nom sur la couverture d’une bande dessinée.

« Come prima »(« Comme avant ») raconte l’histoire des frères Fratelli qui traversent la France et l’Italie en Fiat 500 (lisez cinquecento) pour rejoindre leur village natal. En invitant à suivre les pas de deux frangins que tout oppose, Alfred livre un road movie aux allures de tragicomédie à l’italienne. Le chemin emprunté par Fabio et Giovanni lors de cet été de 1958 croise inévitablement celui du passé, faisant remonter d’anciennes tensions et ouvrant d’anciennes blessures. L’aîné, devenu boxeur, n’a pas uniquement encaissé des défaites sur le ring. Refusant d’accepter les défaites de sa vie, lui qui a endossé une chemise noire mussolinienne pour échapper à un destin tout tracé, n’est pas vraiment chaud pour rentrer au pays. Le cadet, quant à lui, tente de mettre de côté sa rancœur pour renouer les liens avec celui qui les a trahi, mais envers qui il n’a jamais cessé d’avoir de l’admiration. Au fil du voyage, le lecteur s’attache inévitablement à ces deux protagonistes qui se révèlent, s’affrontent… mais qui au bout du compte s’aiment. Parsemé de pointes d’humour, cette tragédie humaine allie sincérité et émotions. Des sentiments qu’Alfred restitue une nouvelle fois avec maestria sur le plan visuel. De flash-backs plus flous en aplats de couleurs à des cases rougeâtres pleines de colère, en passant par ce quotidien empli de nostalgie qui invite au voyage, l’auteur livre un travail époustouflant de justesse. Multipliant les non-dits et parsemant son récit de pages muettes, il démontre une nouvelle fois sa capacité à révéler des sentiments tellement profonds qu’ils ne s’expriment pas par la bouche. N’étant moi-même pas très bavard quand il s’agit d’exprimer mes émotions, j’apprécie énormément la force évocatrice de ces moments plus contemplatifs.

Encore un coup de cœur signé Alfred, que vous retrouverez également dans mon Top de l’année !


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Yvantilleuil 3439 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines