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Baroque sicilien

Publié le 19 janvier 2014 par Aelezig

Le baroque sicilien est une forme spécifique d’architecture baroque apparue en Sicile aux XVIIe et XVIIIe siècles. Ce style comporte d’une part des caractéristiques typiquement baroques, telles que la profusion de courbes et d’ornements, mais se distingue aussi du courant européen par l’utilisation de masques ou d’anges souriants (les putti) et plus généralement par une flamboyance qu’il n'est possible de retrouver nulle part ailleurs. Ce type de baroque donne à la Sicile une forte identité architecturale.

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Eglise La Collegiata à Catane - L'université de Catane

Le baroque sicilien voit le jour à la suite d’un puissant tremblement de terre survenu dans la région en 1693, qui impose de reconstruire un grand nombre de bâtiments. Avant cette date, le baroque n'avait fait que discrètement son apparition sur l’île et relevait en réalité d'un style hybride et naïf qui trouvait davantage son inspiration dans l’héritage architectural local que dans l’œuvre des grands architectes baroques installés à Rome. Le séisme fournit aux jeunes architectes siciliens, dont beaucoup avaient été formés à Rome, un terrain idéal pour reproduire le baroque sophistiqué alors en vogue en Italie continentale. Leurs ouvrages, remplis d’innovations stylistiques, inspirent les autres architectes locaux qui finissent tous par suivre le même exemple : dès 1730, les nouvelles constructions en Sicile sont entièrement supervisées par ces architectes natifs de la région et parfaitement rompus au baroque, développant bientôt une interprétation singulière et très localisée de ce courant. Le baroque sicilien tombe en désuétude à partir des années 1780, lorsque le néoclassicisme s’impose comme le nouveau style à la mode.

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Clocher de San Giuseppe à Raguse - Piazza Quattro Canti à Palerme

Le baroque sicilien se distingue la plupart du temps par au moins deux ou trois des caractéristiques suivantes :

  1. Des mascarons et des putti, donnant volontiers dans le burlesque, viennent souvent soutenir les balcons ou décorer l’entablement d’un édifice.
  2. Les balcons, à partir de 1633, sont fréquemment agrémentés de balustrades en fer forgé présentant des motifs complexes.
  3. Les escaliers extérieurs sont assez répandus dans les villas et les palazzi. La plupart de ces résidences sont dotées d’une entrée officielle conçue à l’origine pour les carrosses, consistant en un arc percé dans la façade donnant sur la rue et menant à une cour intérieure. C’est de cette cour que, généralement,s’élève alors jusqu’aux pièces de réception du premier étage, un double-escalier aux entremêlements raffinés : les volées symétriques d’escaliers peuvent changer jusqu’à quatre fois de direction. Les églises, quant à elles, ne sont souvent accessibles qu’au bout d’un long escalier rectiligne.
  4. Les façades, qu’il s’agisse des églises ou des palazzi, sont fréquemment courbées de façon concave ou convexe. À l’occasion, le renfoncement ainsi créé par la courbe servait à implanter un escalier extérieur.
  5. Le clocher, en Sicile, n’est pas installé sur un campanile à côté de l’église, comme c’est souvent le cas en Italie continentale, mais sur la façade de l’édifice religieux lui-même, la plupart du temps au-dessus du fronton central. Le clocher compte une ou plusieurs cloches, chacune sous son propre arc. Lorsque l’église est particulièrement importante et qu’elle possède de nombreuses cloches, les hauteurs de la façade principale prennent la forme d’une arcade richement sculptée et décorée. Le clocher constitue l’un des éléments les plus typiques et permanents du baroque sicilien.
  6. L’intérieur des églises arbore une profusion de marbres colorés, incrustés dans le sol comme dans les murs.
  7. Les colonnes, surtout au début de la période, ne sont que très rarement agglomérées, mais plutôt déployées individuellement. Par ailleurs, même si elles sont souvent ornées de dorures, elles ne soutiennent généralement que des arcs de facture très simple, ce qui dénote l’influence encore forte de la période normande, beaucoup moins sophistiquée.
  8. Les pierres de taille font l’objet d’un soigneux travail de sculpture et de décoration. Dès la fin du XVIe siècle, les architectes siciliens ornaient la pierre de gravures représentant des feuilles, des écailles de poissons ou même des coquillages. Ces derniers allaient s’imposer ensuite comme le motif dominant du style baroque. Parfois, ce travail de la pierre est effectué sur les piliers plutôt que sur les murs, par pur désir de surprendre.
  9. De nombreux bâtiments du baroque sicilien ont été construits à partir de la roche volcanique locale, étant donné qu’elle est la plus aisément accessible. Ses nuances de noir et de gris sont régulièrement mises à profit pour créer des effets de clair-obscur, accentuant ainsi la prédilection déjà forte du baroque pour l’ombre et la lumière.
  10. L’influence architecturale de l’Espagne, alors au pouvoir sur l’île, peut se faire ressentir, bien que moins intensément que le gothique normand. Le style hispanique est particulièrement perceptible à l’est de la Sicile : la monumentale Porta Grazia de Messine (1680), par exemple, ne dépareillerait pas dans les autres villes et citadelles de l’Empire colonial espagnol.

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Piazza del Duomo à Syracuse

La "régionalisation" du baroque n'est cependant pas spécifique à la Sicile, et se reproduit dans d'autres contrées européennes telles que la Bavière ou la Russie. Le baroque Narichkine, typique de la région moscovite, est par exemple aussi excentrique que son cousin sicilien. La plupart des palazzi baroques sont restés des propriétés privées tout au long du XIXe siècle. Ils changent en revanche souvent de mains, au fur et à mesure que la vieille aristocratie tisse des liens matrimoniaux avec la bourgeoisie ou s'enfonce dans l'endettement. Seules quelques rares familles ont pu conserver leurs demeures ancestrales jusqu'à aujourd'hui. Quant aux églises, la grande piété dont continue à faire preuve la population sicilienne leur permet de perpétuer leur vocation originale et de ne pas devenir de simples pièces de musée.

La dégradation et l'actuel état désastreux de tant de palazzi ne doivent pas être simplement imputés à des propriétaires peu soigneux, mais aussi au manque de volonté politique des gouvernements italiens qui se sont succédé au pouvoir. Certaines des plus belles villas ou des plus beaux palais sont toujours en ruines depuis les bombardements américains de 1943. Bien souvent, rien n'a été tenté pour les restaurer ou même pour préserver ce qui en restait. Quant aux édifices qui ont survécu à la Seconde Guerre mondiale, ils ont connu fréquemment un cloisonnement en bureaux ou en appartements, ce qui implique le démantèlement, la division ou la vente des intérieurs baroques.

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Palazzo Beneventano del Bosco à Syracuse

Les derniers princes, marquis et comtes de Sicile préfèrent souvent vivre dans un isolement plein de superbe, entourés de beauté et de déchéance. Les propriétaires et les pouvoirs publics commencent toutefois à vouloir assurer la sauvegarde de ce patrimoine de l'histoire sicilienne.

Les palais baroques de Sicile, profitant de l'essor touristique de l'île, ouvrent progressivement leurs portes à un public curieux. Il y a encore quelques années, la salle de bal du palais Gangi était la seule de la région à pouvoir s'enorgueillir d'avoir été le lieu de tournage d'un film, tandis qu'aujourd'hui nombre de grands salons d'apparat et de salles de bal se mettent à accueillir des événements publics ou privés. Quelques palazzi offrent même un service « Bed and Breakfast » aux visiteurs de passage, renouant ainsi avec la grande tradition d'hospitalité pour laquelle ils avaient été conçus.

D'après Wikipédia


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