Magazine Culture

Eviter les péages, Jérôme Colin

Par Laurielit @bloglaurielit

éviter les péages, jérôme colin"Marcher sur l'eau. Eviter les péages. Jamais souffrir. Juste faire hennir les chevaux du plaisir." Je sourie. Si seulement je pouvais..."

Il est chauffeur de taxi. Il a quarante ans. Avait-il rêvé gamin de cette vie-là? Non. Il a une femme, 3 enfants, une maison...une vie rangée, une vie immobile selon lui. Il est à un moment de sa vie où il se pose des questions sur le sens de sa vie justement, sur les raisons qui amènent à accepter un boulot de taxi, à acheter une maison, faire des enfants et voir peu à peu le quotidien dévorer la passion, les envies les plus folles, les rêves. Entrer dans cette vie-là, il ne l'a pas vu venir...Puis, à ce moment de réflexion de sa vie, il rencontre Marie. Marie ou l'interdit. Marie ou le désir de revivre des sensations de la première rencontre, des premiers mots échangés, l'attente du rendez-vous et du mariage des corps.

"Que ne durent que les moments doux" disait Bashung. C'est bien ce dont chacun rêve.

Au-delà d'un livre sur l'infidélité, j'ai lu et ressenti ce roman comme un questionnement sur nos vies, nos choix de vie. A quel moment se rend t-on compte que nous avons basculé dans une vie normée? On est jeune, on a des rêves, puis on se pose, on se marie, on fait des enfants, on bosse...

"Je fais ce qu'on m'impose de faire : ramener du fric. M'emmerder à travailler. Tenter d'avoir la plus petite vie possible. Sans faire de vagues. Je me lève, je rame, je me couche. Merci d'avoir participé à cette belle journée. Sois fiable, sois honnête, sois responsable. Sois un homme bien. Ne prends pas de risques. Evite les accidents. Passe au vert. Dis non à la folie. A la voisine. A l'appel du large. Vis étroit. Une vie immobile."

et on achète une maison, bien-sûr :

"La maison. Un mot que j'adore parce qu'il me structure, me rassure, me définit presque. Qui me terrifie pour tout ce qu'il représente. Il y a dix ans, nous avons, ma femme et moi, acheté cette jolie petite prison trois façades. On en a pris pour trente ans. "Tiens, chérie, voilà les clés de notre nouvelle maison. Tu sais, ce chouette endroit qu'on va retaper pendant des années, histoire de gâcher tous nos week-ends. Dans lequel on va élever nos mômes durant les dix années qu'il leur reste à vivre avec nous. Avant de nous retrouver tous les deux avec trois chambres fermées à double tour pour toujours. Tiens, voilà les clés de ce paradis qui va nous sucer pendant trente ans..." Moi, en colère? Si peu..."

C'est en fait l'histoire d'un type normal qui se pose des questions sur la vie, la maladie aussi et la mort. Les moments où il parle à son père, décédé, sont émouvants. Et puis il y a la rencontre avec Henry, ce type un peu bizarre, un ami...presque.

J'ai tout aimé dans ce livre, le titre qui m'a intrigué, l'histoire, le style littéraire. Dans une écriture fluide, ironique, l'auteur dont c'est le premier roman nous secoue. Au rythme de la musique, des rencontres dans le taxi, on se balade dans cette voiture, une course en taxi, une course où on réfléchit sur la vie, sur notre vie, sur le quotidien, sur la mort, sur le couple...Faut-il tout lâcher, vivre ses rêves de jeunesse? Ne risque t-on pas de toutes façons de retrouver au bout les mêmes emmerdes du quotidien et les mêmes morsures? Finalement il faut du courage pour vivre, affronter son quotidien, se poser des questions, se remettre en question, se relever. Une ode à la vie, une ode à la difficulté de la vie, aux questionnements nécessaires mais qui font mal. Un premier roman absolument réussi, un coup de coeur, dévoré en deux jours.

Une si belle lecture, je ne pouvais la partager qu'avec Stéphie.

Quelques phrases au fil de la lecture :

"Le couple finit par être le lieu d'un étouffement qui nous vole à nous-même. Il consiste à se mettre au service des autres et s'oublier. Absorbé par les tâches à remplir et les gens à rendre heureux".

"Des listes tout le temps, toujours, pour tout. Quand est-ce qu'on prendrait enfin le temps de ne rien foutre?"

"Ce n'était pas la présence de mon père sur cette pelouse qui me faisait mal, c'était son absence partout ailleurs."

"Je l'ai regardé longuement. Il était à bout de souffle, épuisé. Je l'ai embrassé sur le front et suis sorti de la chambre. Ils sont mortels, les baisers du chagrin".

Le site des éditions Allary : http://www.allary-editions.fr/publication/eviter-les-peages/


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Laurielit 3519 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazines