Fiche technique :
Avec Amira Casar, Julie Gayet, Bruno Putzulu, Johnny Hallyday, Alexandra London, Carmen Chaplin, Brigitte Rouan, Marie-France Pisier et Eli Medeiros. Réalisé par Stéphane Giusti. Scénario : Stéphane Giusti. Directeur de la photographie : Antoine Roch.
Durée : 95 mn. Disponible en VF.
Résumé :
Camille, fanatique de la Guerre des étoiles, aime et vit avec Ariane qui, elle, préfère Kierkegaard. Les parents d'Ariane ne sont pas au courant de leur relation amoureuse. Eva et Nico, amateurs d'Alien, forment un couple hétérosexuel parfait aux yeux de leurs parents mais Eva aime les filles et Nico les garçons. Enfin Lili, la secrétaire des éditions de science-fiction où ils travaillent tous ensemble aime les garçons mais collectionne les chagrins d'amour. Josepha, la mère de Camille, décide de réunir tout ce petit monde dans son château le temps d'un week-end.
L’avis de Yann Gonzalez :
Pourquoi pas moi ? est une agréable surprise ; l’on pouvait en effet
craindre le pire à l’idée de découvrir la crème des jeunes acteurs français jouant aux homos dans le cadre d’une comédie populaire. La présence d'un Johnny Hallyday entourant ce beau linge
n’était pas non plus très excitante, au regard d’une filmographie composée exclusivement de navets hormis Le Spécialiste de Sergio Corbucci et Détective de Godard. De plus, le
film démarre assez mal en suivant Camille (Amira Casar), jeune fille à la démarche garçonne et au regard baladeur dont les répliques sont référencées Star Trek et Star Wars. Aïe
! Pourtant, peu à peu, à travers son récit d'un gay et de trois lesbiennes décidant de faire ensemble et dans une grande villa leur « coming out » (c'est à dire, révéler leurs tendances
à leurs parents), Pourquoi pas moi ? va prendre ses marques et nous séduire ; et ce malgré une mise en scène assez plate dont les quelques "audaces" ne sont pas vraiment
justifiées (surtout quand les personnages se retrouvent comme projetés dans l'espace filmique entre le début et la fin d'un mouvement de caméra).
Première qualité : le film a l'intelligence d'éviter la caricature genre "folles" et "camionneuses", ce qui est certainement une première dans
l'histoire de la comédie française abordant un tel sujet. Car Stéphane Giusti est trop proche de ses personnages pour les réduire à des archétypes risibles (même l'affreux paternel incarné par
Jean-Claude Dauphin finira par avoir sa chance). Si le spectateur s'amuse ici, c'est toujours avec eux, et jamais de façon condescendante. Pourquoi pas moi ? transpire
l'amour, le désir, la joie de vivre ; et ça fait du bien parce que c'est une démarche devenue rare.
Le casting, quant à lui, est assez jouissif, et, outre les comédiens précédemment cités, on retiendra les prestations de Brigitte Roüan, Marie-France Pisier (toujours hilarante et même touchante dans son rôle de bourgeoise maniérée), Elli Medeiros, Assumpta Serna et la géniale Vittoria Scognamiglio (ces deux dernières interprétant Viens m'embrasser, version espagnole, de Julio Iglesias, dans la scène la plus réussie du film). Ces cinq mères sont improbables comme l’ensemble du film (il n'est pas très fréquent, je pense, qu'une mère suive sa fille dans une boîte homo quelques heures après que celle-ci lui ait indiqué ses préférences)... Pourquoi pas moi ? est davantage du côté de la rêverie, de l'utopie ; et, par là-même, nous réconcilie pour un temps avec le monde.
L'avis de Parpaing :
Un groupe de gays et de lesbiennes, colocataires, cobites, cofounes et collègues décident d'annoncer leur homosexualité à leur parents au cours d'un déjeuner convoqué ad hoc. Ils veulent dénoncer un mensonge qu'ils entretiennent collectivement, les uns faisant croire depuis quelques années qu'ils vivent ensemble et qu'ils sont futur mari et femme (le beau BrunoPutzuludel'AcadémieFrançaise), les autres qu'elles sont justes colocataires (les deux autres filles).
Annoncer à la famille que ce qu'on vit n'est pas vraiment ce qu'ils attendent, mais plutôt ce qu'ils redoutent, ce n'est pas facile – ah bah non, c'est pas facile.
Je n'ai quand même pas trop accroché à la présentation typée de tous les personnages. Les gays en question font des efforts pour ressembler à un certain modèle, tout en essayant, pour faire genre, de ne pas en avoir l'air : Bruno Putzulu en footballeur hétérrorisant, une telle qui dès qu'elle le peut s'agrafe de piercings, les autres hésitantes entre féminité et moue lesbienne.
Les parents, spécialement choisis pour leurs airs de Monsieur et Madame Tout le monde, sont à peu près aussi crédibles : Johnny Halliday en ex-torero-qui-pique-sa-colère-quand-il-faut-mais-qui-est-tolérant-quand-même, une mère fanatiquement pro-gay, le couple bourgeois et coincé versus le couple fauché mais tolérants, sans oublier la maman diva qui était finalement lesbienne (quoique, était-ce vraiment une femme ???).
Comédie gentille, qui se nourrit de clichés agréables et de plus ou moins bons mots, qu'on peut voir dans une salle conquise. Mais pas trop subtile.
Je suis un peu fatigué de ce genre de film mettant en scène de manière centrale des personnages homosexuels. Le thème de la différence est exploité de plus en plus en tant qu'outil d'affirmation et d'existence (« on est belles, on est lesbiennes, on est fières », entend-on dans le film), mais plus en tant que moyen de réflexion sur soi et son propre statut, sur sa propre normalité. On affirme sa propre normalité sans nuance, et on reconstruit des clichés et des normes pas forcément plus réfléchis que ceux qui viennent d'être dénoncées.
On décrédibilise l'autre en le traitant de réactionnaire, en en faisant un épouvantail. Le père qui dans ce film n'accepte pas l'homosexualité de sa fille se décrédibilise tout seul en utilisant des arguments que même Christine Boutin a déjà arrachés de son missel ! Pourquoi les parents ne sont-ils pas contents de savoir cela ? Mystère. Et pourquoi vont-ils l'accepter ? Parce qu'il faut bien. Un peu court, tout cela – même pour une comédie.
L'homosexualité dans le cinéma a eu cela de très intéressant qu'elle permettait les double lectures de films, les sens cachés, les seconds degrés : comment représenter dans un film ce qui est interdit ? C'était une belle contrainte.
Maintenant qu'on peut tout dire, voire qu'on doit tout dire directement, l'homosexualité est-elle encore un thème contraignant ?
Dire les choses sans les dire, quelle belle complication – ah, où sont passés nos pédérastes d'antan ?
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