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Mon premier mariage gay

Publié le 22 novembre 2009 par Magda

Mon premier mariage gay

Photo de Pierre et Gilles

Vendredi,  j’étais invitée à mon premier mariage gay. C’était à la Rotes Rathaus (la plus célèbre mairie de Berlin), impressionnant monument de brique rouge qui se dresse sur l’Alexanderplatz. Code vestimentaire : “Gris Crise”, “Noir Désespoir”, “Blanc Néant”, avec juste une touche de couleur et un panier de pique-nique plein de bouffe.

Je débarque donc en tenue de souris intégrale, grise des pieds à la tête, les lèvres orange flash. Française toujours, j’arrive en retard, gare mon vélo minuscule devant un manège de petits chevaux, cours avec mes 20 kilos de provisions sous le bras et me fais bien remarquer en faisant claquer mes talons dans l’immense hall de la mairie. Avec horreur, je m’aperçois que seul mon amoureux (vêtu de noir corbeau), les époux et moi-même avons réellement respecté le code couleur. L’Allemand a des goûts de chiotte, c’est connu, et c’est vrai ; l’Allemand ne comprend rien à la beauté de la couleur unique (peut-être aussi par une peur justifiée de l’uniforme) ; il a tenu à égayer son habit du dimanche d’un haut imprimé de tournesols maladifs ou de chaussures de randonnée.

Le moment historique (historique, s’entend, pour la Française que je suis) approchait. Les deux “JA” (“oui”) virils qui retentirent dans la salle firent gentiment rire. Les deux mariés se regardent, l’œil humide. L’un d’eux ne tient plus. Il se jette sur l’homme de sa vie et l’embrasse fougueusement. Une larme bêtement retenue vient brouiller ma vue lorsque la mère d’un des époux, le cœur comprimé, se lève pour crier “Oh mein Gott!” et éclate en sanglots de joie.

Et puis la fête, ensuite, où l’on déballe les paniers de pique-nique et on parle à tout le monde, où on se fout que Machin soit le cousin de Bidule, mais où on échange des blagues et des idées, où une jeune femme blonde, les cheveux tressés, se met à jouer de la cithare et à yodler pour les heureux mariés qui dansent, tous deux en costume noir, sur la scène d’un théâtre transformé pour l’occasion en salle des fêtes.

C’est là, je me disais, qu’il faudrait que j’emmène tous ceux qui se demandent pourquoi j’ai choisi de vivre dans cette ville grise et même pas jolie. Parce que ce n’est pas à Paris, lovée dans le luxe doré des cérémonies creuses à la française ou dans la platitude des fêtes de PACS, que je verrai un couple aussi émouvant que celui-là se dire oui pour la vie.


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