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Concours de récits érotiques - Récit 4 - Auteur : Vita/Orlando

Publié le 26 janvier 2010 par Neoplaisir

Marin d'eau douce

Cétait un de ces soirs d’été qui donnait à Aurore un envie furieuse de voir du monde, de séduire et d’être séduite. La molle chaleur de la journée avait agacé son idée fixe comme un poil à gratter vous obsède opiniâtrement. Elle avait attendu que le soleil se couche, cela fut long car en été l’astre s’attarde et promène longtemps ses rayons sur la terre. Elle avait attendu, disais-je, qu’il fasse nuit pour enfiler une robe de soie crème, une de celles qui tournent comme une corolle autour de ses hanches, et ses gants blancs. Elle avait placé sur son chignon un petit chapeau de paille et avait filé hors de chez elle, se coulant dans les ténèbres avec un frisson d’excitation.

Le bruit de ses talons emplissait les rues qu’elle traversait. Elle marchait le cœur léger, entre les maisons basses, en jetant un œil curieux par les fenêtres éclairées, volant un instant de vie intime à des étrangers. Elle longea le coteau puis tourna à droite, descendit la ruelle pavée qui menait à l'église puis traversa le pont de bois en s'amusant à sauter de planche en planche, en prenant garde à ne pas coincer son talon entre deux lattes. Des grenouilles croassaient sans se soucier du rythme. Devant la maison du maire, un ancien manoir style Louis XIII qui s'avançait vers la plaine comme un navire élance sa proue vers le large, elle prit le chemin qui descendait en direction du fleuve. Elle sautillait en chantant, détachait précautionneusement sa jupe que les ronces retenaient et humait les effluves qui venaient de la rive. La nuit était chaude et envahie par des bruissements d'insectes et de feuillages. La musique du bal lui parvenait par moment et quelques rires fusaient, soudains, s'élevant dans la futaie. L'odeur de vase et d'eau poissonneuse devint plus forte - elle arrivait au bord de l'eau. Aurore prit sur sa droite et les lumières des Matelots du Pont de pierre apparurent. Un picotement nerveux saisit tout son corps. Elle lissa ses cheveux, poussa la barrière de bois et pénétra dans le bal en jetant des regards de chasseur expert sur les marins attablés-là.

Le patron vint la saluer en lorgnant les pointes tendues de ses seins qui coloraient l'étoffe claire de sa robe. Il la prit par la taille et la guida d'un geste sûr vers une table de jeunes gens tapageurs.

- Messieurs, les interrompit-il, permettez-moi de vous confier cette jolie personne. Tâchez d'être délicats avec elle, ajouta-t-il en clignant de l'œil.

Et il s'en alla saluer le flot incessant des couples et des gens seuls qui arrivaient, avec ce même air familier qui vous donnait l'impression d'être une créature privilégiée.

Quand Aurore ôta ses gants et demanda qu'on lui fasse une place sur le banc les convives rivalisèrent de galanteries, allant jusqu'à lui offrir leurs genoux. Elle déclina les offres poliment et s'installa finalement sur le coin de la table, parmi les assiettes sales et les verres de bière. Cela fit beaucoup rire et chacun se consola de ne l'avoir pas près de lui en la voyant si joliment offerte à tous sur la table. Alors elle discuta vivement, soutint des points de vue outrés, levant son verre à chaque nouvelle tournée. Ses belles joues blanches avaient rosi et son agitation incessante avait ouvert, avec un charme providentiel, le premier bouton de sa robe.

Dans un coin un jeune marin discret souriait aux arguments de la jeune femme qui tutoyait ses compagnons et leur tapait dans le dos fraternellement. Aurore aussi l'avait vu et elle lançait vers lui un regard lourd de sous-entendus. C'était un garçon sans âge, à qui la rondeur gracile du visage donnait un air d'enfant précoce. Ses cheveux clairs étaient rasés courts, ce qui dégageait sa nuque musclée et donnait à Aurore l'envie d'y poser les lèvres.

Quand les gauloiseries des buveurs l'eurent lassée elle se leva avec nonchalance, donnant un coup de hanche qui fit envoler les volants de sa robe, et avança lentement en feignant d'observer le mouvement du vent dans les arbres. Sans qu'il ait le temps de s'en apercevoir Aurore s'était assise près de lui et s'était accoudée à la chaise qu'il occupait. Elle se pencha vers lui en posant un avant-bras sur l'autre, faisait saillir avec une candeur mutine la chair de ses seins. Elle sourit et lui glissa à l'oreille, comme on verse de la liqueur dans un petit verre :

- Bonsoir.

Il s'appelait Armand. Ils bavardèrent comme de vieilles connaissances, retardant le moment où il faudrait se quitter ou s'inviter à poursuivre plus avant. Aurore promenait ses yeux sur le maillot rayé et tendu par les muscles du matelot, envahie par le désir de lui. Elle retenait sa main d'aller pétrir les épaules fortes qui tiraient le tissu et de s'emparer de la bosse qui saillait outrancièrement au creux de ses cuisses. Elle aimait le petit calot blanc posé de travers qui soulignait la régularité de son visage. Pour plaisanter elle le lui prit et le posa sur sa tête, à la place de son paille. Elle était charmante ainsi et il osa lui demander de quitter le bal avec elle.

Quand ils arrivèrent dans la chambre d'Armand ils continuèrent leur discussion en buvant un thé. Ils savaient tous deux qu'ils finiraient nus, enlacés et en sueur - l'attirance physique faisait palpiter tout leur être - mais ils ne se pressaient pas, goûtant ce tête-à-tête imprévu, retardant le premier baiser pour le mieux savourer plus tard. Un instant leurs yeux se croisèrent, leurs visages étaient proches ; Aurore sentait l'haleine légère d'Armand effleurer ses cheveux. Le désir déborda leurs lèvres, brouilla l'espace entre eux deux puis disparut, fugace, en les laissant balbutiant. Ils baissèrent les yeux, gênés par ce moment d'intimité. L'envie reflua pour aller se loger au chaud dans leur ventre. Aurore murmura :

- Puis-je vous embrasser ?

En guise de réponse il prit sa taille et baisa pudiquement la bouche d'Aurore. Elle lui rendit son baiser du bout de la langue en posant ses mains fraîche sur la nuque du marin. Ils s'embrassèrent longtemps, assis sur le bord du lit comme sur un banc d'église. Armand déboutonna la robe d'Aurore, fit tomber les fines bretelles de son soutien-gorge et le lui ôta avec une dextérité de harpiste. En la couchant sur l'oreiller il mordilla la peau fine de sa nuque et de ses trapèzes. Sa chair s'hérissa d'un long frisson, son corps tout entier s'éveillait d'une vie nouvelle qui criait une faim de caresses.

Il avait gardé son maillot.

Aurore ouvrit la braguette du pantalon de toile bleue du matelot. Il s'allongea sur elle et la chaussette glissée en boulé à l'entre-jambe roula sur le matelas et tomba au sol. Aurore leva un regard surpris sur Armand.

- Je n'ai pas besoin de ça, dit-il en riant.

Elle sourit et l'attira sur elle. Le jeune marin passa sa paume entre les cuisses d'Aurore et les écarta pour la pénétrer de ses doigts. La chair tendre fondit pour accueillir les membres vigoureux qui la projetaient en arrière. Il la prit par la nuque pour la retenir et l'emplir de toute sa main. Elle criait, se débattait pour échapper à ce poing conquérant qui s'emparait de son ventre et le réduisait en bouillie. Il lui semblait que le matelas disparaissait sous elle, qu'elle tombait en chute libre. Ses yeux se raccrochèrent aux clavicules d'Armand et elle resta suspendue aux petits os, là où dansaient les muscles des pectoraux. Un ressac de plaisir monta le long de ses jambes et un flot jaillit entre ses cuisses, inondant le drap et les genoux du matelot qui souriait, fier et inquiet comme un capitaine barrant en pleine tempête. La bourrasque revint, mouillant encore la couche défaite et empêtrée de draps. Armand lâcha la nuque d'Aurore pour appuyer sa paume sur ses nymphes et son clitoris. Elle fut secouée par la survenue d'un plaisir singulier, son bassin se leva et un cri profond remplaça un instant le grincement du sommier. Le silence se fit à nouveau et Aurore resta immobile, fauchée par la violence de la possession.

Il lui offrit un thé au citron fumant et ils le burent en dissertant avec légèreté. Enfin elle s'en revint chez elle en marchant à pas lents dans la campagne que le soleil levant rosissait.

Vita/Orlando

Son blog : http://vitaorlando.canalblog.com/


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