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L'évêque pédophile belge achetait le silence de la famille

Publié le 07 août 2010 par Louis2debaviere @munichandco

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L'ex-évêque de Bruges, Roger Van Gheluwe (photo Carolus) a confirmé hier soir par la voix de son porte-parole que  "Jusqu'à l'année passée, Mgr Roger Vangheluwe a versé des sommes considérables à la famille de sa victime en guise de dédommagement". Toute la presse belge de ce matin évoque cet aveu ce matin, qui arrive au moment même où la Chambre des mises en accusation se penche sur l'affaire.

Dédommagement...le terme est un édulcorant, on fait à nouveau dans la dentelle: ne s'agissait-il pas d'acheter le silence de la famille, un élément de corruption supplémentaire, un chantage à la respectabilité?

L'église catholique belge avait transmis sur cette affaire un communiqué de presse bilingue polyphonique que l'on trouve en ligne sur le site catho.be. On pourra le lire ci-dessous pour sa partie en français.

 Au-delà du drame profond et du nécessaire respect pour les souffrances de la victime et de la famille, il est intéressant d'analyser le discours interne de l'église catholique dans ces documents: il oscille entre un aveu de culpabilité en fait très limité et une forte tendance à l'auto-justification, du style  nous avons autrefois couvert et mis le couvercle sur ce genre d'affaires, on n'aurait pas dû, mais elles sont de toute façon rares/ le droit canon est la solution à ce genre de problème, mais bon on doit aussi aujourd'hui collaborer avec la justice civile, on ne peut plus faire autrement/ et on ne va surtout pas se pencher sur les causes réelles de la pédophilie des prêtres.../ on avait mis en place une commisssion pour traiter convenablement de ces affaires, voyez ce que vous en avez fait...Visiblement la hiérarchie catholique n'a pas encore bien compris ni l'ampleur de ces affaires, ni le fait que sa gestion catastrophique de la sexualité des prêtres peut conduire à voler et violer l'affection des plus faibles par des comportements aussi pitoyables et infamants que la pédophilie;  reste le bon sens du public, qui n'est en rien contraint d'avaler les bobards mielleux qu'on lui présente. A l'église catholique, on peut suggérer  de prendre connaissance des avancées de l'analyse systémique, cela lui permettrait d'appréhender la problématique de manière plus globale et d'analyser ses responsabilités dans ce type d'affaires.

 Voici les textes mis en ligne par l'église catholique belge (s.d.):

 Démission comme évêque de Bruges 

Quand je n’étais pas encore évêque et également un certain temps après, j’ai abusé sexuellement d’un jeune de mon entourage proche. La victime en est encore marquée. Durant les dernières décennies, j’ai à plusieurs reprises reconnu ma faute envers lui, ainsi que sa famille et j’ai demandé pardon. Mais ceci ne l’a pas apaisé. Moi, non plus. La tempête médiatique de ces dernières semaines a renforcé le traumatisme. Ce n’est plus tenable. Je regrette profondément ce que j’ai fait et présente mes excuses les plus sincères à la victime, sa famille, toute la communauté catholique et la société en général. J’ai présenté ma démission comme évêque de Bruges au Pape Benoît XVI. Celle-ci fut acceptée ce vendredi. Désormais, je me retire. 

Roger Vangheluwe

Texte de l'archevêque Léonard 

Nous sommes confrontés à une situation particulièrement sérieuse. Nos pensées vont en premier lieu vers la victime et sa famille, dont beaucoup de membres n’apprennent qu’aujourd’hui la bouleversante nouvelle. Pour la victime, il s’agit d’un long calvaire, qui n’est sans doute pas encore terminé.

En ce qui concerne Mgr Roger Vangheluwe, il a droit, en tant que personne, à la conversion, confiant dans la miséricorde de Dieu. Mais, sur le plan de la fonction, il était indispensable que, par respect pour la victime et sa famille et par respect pour la vérité, il se démette de sa charge. Ce qui est fait. Le pape a immédiatement accepté la démission de l’évêque de Bruges. Elle est, en ce moment même, rendue publique à Rome.

 L’Eglise souligne ainsi qu’en ces matières, il n’y a pas à tergiverser. Nous espérons contribuer de la sorte au rétablissement de la victime.  La décision de l’évêque de Bruges ainsi que l’organisation de cette conférence de presse correspondent à la volonté de transparence que l’Eglise catholique de Belgique veut désormais rigoureusement appliquer en la matière, en tournant résolument la page par rapport à l’époque, pas si éloignée, où, dans l’Eglise comme ailleurs, on préférait la solution du silence ou du camouflage.

 Il va sans dire que cet événement sera très douloureusement ressenti dans toute la communauté catholique belge, d’autant plus que Mgr Vangheluwe était perçu comme un évêque généreux et dynamique, largement apprécié dans son diocèse et dans l’Eglise de Belgique. Et nous, ses confrères, sommes conscients de la crise de confiance que cela va engendrer chez nombre de personnes. Nous osons cependant espérer que la sagesse l’emportera et que les évêques et surtout les prêtres de ce pays ne seront pas abusivement discrédités dans leur ensemble alors que la toute grande majorité d’entre eux mènent une vie conforme à leur vocation, dans une fidélité pour laquelle je tiens à les remercier publiquement.

Texte de l'évêque Harpigny

En tant que référendaire pour la Commission pour le traitement des plaintes pour abus sexuel dans une relation pastorale, j’ai été mis au courant ce mardi 20 avril 2010 de la situation de Mgr Vangheluwe, par un message de l’entourage de la victime adressé aux évêchés. J’étais alors retenu à Kinshasa. J’ai tout de suite veillé à m’assurer qu’il y serait donné le suivi indiqué. Je précise qu’aucun des membres de la Conférence épiscopale n’était au courant de cette situation. J’ai seulement appris qu’au début du mois, le Cardinal Danneels – déjà émérite – avait rencontré la famille à la demande de la famille de la victime et en présence de Mgr Vangheluwe. Il a écouté et constaté que la situation n’était pas apaisée et ne pourrait en rester là. En même temps, la victime a pris contact avec la Commission pour le traitement des abus sexuels dans le cadre d’une relation pastorale. Pour rappel, cette Commission indépendante fut instituée en 2000 par la Conférence épiscopale belge. Un point de contact téléphonique a été établi afin que les victimes des abus sexuels puissent raconter leur épreuve. Selon une procédure adéquate, qui respecte la demande de chaque victime, les membres de la commission veillent à ce que la victime puisse être entendue et qu’elle reçoive l’aide la plus appropriée. Les membres de la commission sont également chargés de donner des avis, des conseils aux évêques et aux supérieurs majeurs qui ont autorité sur les prêtres et les religieux coupables de ces délits. Il est, de toute façon, recommandé aux prêtres et religieux de se présenter à la justice. Il est aussi recommandé aux victimes de porter plainte. Je salue ici le travail remarquable de cette Commission. Son président, le Professeur Adriaenssens prendra la parole dans un instant.

Aujourd’hui Mgr Vangheluwe n’est plus évêque de Bruges et se retire. Désormais, son cas relève de la compétence de la Congrégation pour les Evêques, qui exerce au nom du Pape l’autorité sur chaque évêque. Celle-ci s’adressera à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. C’est cette dernière qui indiquera les mesures canoniques éventuelles à prendre à son égard. En effet, c’est ce que stipule le motu proprio,Sacramentorum sanctitatis tutela (la protection de la sainteté des sacrements) du 30 avril 2001 qui, entre autres, veut protéger les fidèles des abus sexuels. Ce document donne, parmi d’autres dispositions, la démarche à suivre lorsque des prêtres et des religieux sont responsables d’abus sexuels à l’égard des mineurs.

Texte de Peter Adriaenssens, président de la Commission pour le traitement des plaintes pour abus sexuel dans une relation pastorale

Comment réparer un passé devenu trop lourd ?

Le récit de la victime de Mgr Vangheluwe est un cas exemplaire qui démontre que grandir avec un passé trop lourd peut rendre malade dans tous les sens du terme. L'abus sexuel est tout d’abord une question d'abus de pouvoir. Deux caractéristiques empoisonnent les chances de rétablissement : le secret imposé à la victime et le petit cercle fermé dans lequel les faits se déroulent. Que certains, même des années plus tard, ressentent des difficultés à pouvoir vivre dignement suite à ce qui leur est arrivé, trouve ses racines dans ces mécanismes. L'antidote s’impose. Face à l'abus de pouvoir, il s’agit de rétablir l’équilibre des dignités. Face au poids du secret, il y a le droit de retrouver le libre usage de sa parole. Face à ce qui est arrivé à l’abri des regards, il y a la transparence d’une communication ouverte. Ce sont les trois voies de guérison qui peuvent être offertes aujourd'hui à la victime et à sa famille. Nous espérons que les mesures claires, qui touchent aujourd'hui l'auteur des faits, rendront à la victime sa fierté d'appartenir à la société.

Le respect d’une victime qui a le courage de sortir du secret avec le poids de sa souffrance, signifie deux choses : d'une part, le devoir des responsables de tout mettre en oeuvre pour protéger la victime et pour mettre l’agresseur hors d’état de nuire.

D'autre part, il y a la responsabilité pour l'opinion publique de respecter l'anonymat demandé par la victime et sa famille. En tant que président de la commission et personne de contact avec la victime, je demande avec insistance aux médias de respecter cette discrétion.

Je remercie les évêques de Belgique pour l’ouverture d’esprit avec laquelle ils abordent le travail de la commission. La plainte dans l'affaire qui nous réunit aujourd'hui peut être considérée comme un test de transparence et d’efficacité. Ces dernières semaines, les médias ont posé à plusieurs reprises la question de savoir si la commission était en état de formuler ses décisions en toute indépendance. Nous avons estimé inutile de faire mousser à chaque fois le débat à ce sujet. L’unique réponse adéquate est de nous juger sur nos actes.

Chaque dossier d'abus sexuel dans l'Eglise est une situation de perte pour tous. Il y a avant tout l’infini dommage causé aux victimes. Vient ensuite le temps et l'énergie consacrés aux décisions disciplinaires concernant les coupables. Enfin, il y a la perte de confiance. Et celle-ci ne peut être mesurée. Voilà pourquoi, je réitère ici l'appel de la commission, faite non seulement aux victimes mais aussi à toute personne consciente d’avoir dépassé les bornes d’un comportement sexuel acceptable, de ne pas attendre que les victimes aient atteint l'âge de les dénoncer mais de trouver le courage de prendre contact avec nous afin de se faire aider.

 

 

Commentaire du diocèse de Bruges par Peter Rossel, porte-parole

Ce qui arrive est incompréhensible pour les collaborateurs directs de l’évêque et, par extension, pour tout le diocèse. L’entourage de l’évêque est surpris, choqué et désarçonné, parce qu’il n’existait aucune indication que l’évêque vivait sous la pression d’un tel problème. Après sa décision, le diocèse se retrouve décapité. Les collaborateurs du diocèse ont pris acte de cette décision et la respectent. Ils s’unissent surtout à ceux qui ont souffert. Les mots nous manquent dans le diocèse. Le mot ‘inimaginable’ est devenu concret pour nous. Nous soulignons que chaque cas est un cas de trop, mais qu’il s’agit d’exceptions.

Le droit canon prescrit ce qui va arriver : le collège des consulteurs va désigner au plus vite un administrateur diocésain (canon 421). Celui-ci prendra en charge les affaires courantes du diocèse, en attendant la nomination d’un nouvel évêque par le pape. Jusqu’à cette désignation et vu que tous vicaires de l’évêques sont automatiquement démissionnaires selon les prescriptions du droit canon, le diocèse ne fera pas d’autres communications.

 

 


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