Un film à ne pas manquer : Cellule 211

Publié le 11 août 2010 par Gayvox


Ce film est etonnant , epoustoufant, une reussite totale, mieux que "Le prophete" sorti précédemment

Synopsis :


Soucieux de faire bonne impression, Juan débute un jour plus tôt son nouveau travail dans une prison de haute sécurité. Mauvais timing ! À peine arrivé, il se retrouve au cœur d'une émeute. Personne ne le connaît et le hasard va lui permettre de se faire passer pour un prisonnier. Il peut ainsi approcher le leader de l'insurrection. Quand des membres de l'ETA sont retenus en otage, l'affaire prend un tour politique et le gouvernement s'en mêle.
* Date de sortie : 4 août 2010
* Réalisé par Daniel Monzón
* Film espagnol
* Avec Alberto Amman, Luis Tosar, Antonio Resines
* Durée : 1h 45min


Les films de prison ont toujours crée une sorte de fascination malsaine sur le spectateur, sans doute liée au fait que le cinéma représente pour beaucoup, inconsciemment ou pas, une façon de vivre par procuration des drames extrême qu'on ne vivra jamais. Fantasme inavouable ou peur primale, le milieu carcéral provoque à coup sur des réactions viscérales selon le traitement dont il bénéficie au cinéma.

On ne compte plus les oeuvres puissantes, des Évadés au récent chef d'oeuvre de Jacques Audiard, un Prophète, en passant par le terrible Midnight Express. Le point commun de tous ces films? Au delà d'une mise en scène irréprochable ils sont portés par d'immenses acteurs permettant de créer l'empathie envers des personnages qu'on sait profondément mauvais.

Et hasard du calendrier (ou pas) cet été à quelques semaines d'écarts sortent le soit-disant impressionnant Dog Pound de Kim Chapiron et ce Cellule 211 sorti fin 2009 dans son pays d'origine, l'Espagne, où il a rencontré un franc succès public et critique, avec à la clef pas moins de 8 Goyas, l'équivalent de nos Césars ou des Oscars américains.

Premier constat, il semblerait que nos voisins ibériques n'éprouvent d'aucun manière notre complexe franco-français vis-à-vis du cinéma de genre qu'ils n'hésitent pas à récompenser. Deuxième constat, ce cinéma de genre espagnol qu'on sait si vivant et passionné sait aller au delà du fantastique et de la stylisation, il peut être réaliste, brutal et sans concession. Cellule 211 est de ces films qui nous arrivent en pleine gueule tel un direct du droit, et ça fait mal.

On n'en attendait pas moins de Daniel Monzón, réalisateur surdoué qui frappait déjà très fort avec son premier film le Coeur du Guerrier, version modernisée et adulte de l'Histoire sans Fin et grand film méconnu d'heroic Fantasy avant de confirmer avec un Kovak Box rondement mené. Changement de style brutal ici car s'il reste dans le thriller en adaptant la nouvelle de Francisco Pérez Gandul, il nous plonge dans l'enfer des quartiers de haute sécurité espagnols et le voyage est des plus douloureux. Cellule 211 prend la forme d'un véritable thriller et non d'un portrait du milieu carcéral comme cela est souvent le cas. Juan est projeté sans le vouloir dans la cage aux lions qu'il devait normalement surveiller sans y entrer, le choc est immédiat! En effet, un gardien parmi les prisonniers en pleine rébellion de ces derniers n'a en théorie qu'une durée de vie extrêmement limitée. Ainsi se met en place une sorte de jeu de dupes dont on imagine l'issue terrible.

Le réalisateur nous plonge d'entrée de jeu dans son univers infernal. Une scène d'introduction aussi sobre que vraiment choquante, posée et qui installe un malaise et une tension qui durent même après la projection. Monzón ne s'embarrasse pas d'une exposition trop longue et dévoile rapidement les pièces de son échiquier. Il ne s'embarrasse de rien du tout d'ailleurs avec un scénario simple et qui va droit au but: soit Juan réussit à garder son identité cachée et restera en vie, soit non. Trahisons, violences, manipulations, toutes les figures y passent dans un ensemble dur et âpre.

Le réalisateur s'appuie sur une galerie de personnages exceptionnelle, des gueules impressionnantes dominées par une sorte de roi. Sans le rendre forcément iconique par une pose démesurée, Malamadre (" mauvaise mère ") s'impose comme une figure qui écrase toutes les autres. Un charisme naturel, une voix de bad guy, un physique animal, typiquement le mec qu'on évite de bousculer dans la rue. Tout se met à graviter autour de lui, il semble avoir droit de vie et de mort sur quiconque entre dans cette prison et le destin de Juan se trouve donc intimement lié au sien.

Sur cette trame presque simplissime, une simple histoire de survie en milieu naturellement hostile brillamment écrite par le scénariste attitré d' Álex de la Iglesia, Jorge Guerricaechevarría , le réalisateur impose un style brut de décoffrage qui n'en finit pas de nous assommer. Point de stylisation ou d'esbroufe, le réalisme est à la fête. Caméra à l'épaule, cadrages au hauteur d'homme ou en légère contre plongée quand elle s'attarde sur Malamadre, il développe sa mise en scène en gardant toujours sa ligne directrice: efficacité maximum. Il n'en démord quasiment jamais malgré qu'il se laisse parfois aller à quelques fautes de goût malheureuses comme les flashbacks ni vraiment utiles ni visuellement convaincants.

Sa volonté de rentre le spectateur groggy se retrouve jusque dans ses choix de narration parallèle comme l'incident avec la femme de Juan par exemple, légèrement too much même si cela reste efficace sur le plan émotionnel.

On est quasiment dans du cinéma vérité, même s'il s'agit d'une pure fiction, et le portrait de la prison fait froid dans le dos. Mais le plus impressionnant, ce sont les prisonniers. Aucune faute de goût dans le casting qui réunit sans doutes les pires gueules du cinéma espagnol. On est surpris de retrouver Carlos Bardem (le frère de Javier) en chef de gang latino hyper crédible, Antonio Resines en maton ultra violent ou Luis Zahera dans un rôle plus qu'ingrat.

Mais c'est le duo en tête d'affiche qui cartonne. Alberto Ammann, acteur peu expérimenté, impressionne par son naturel dans le rôle de celui qui découvre la peur viscérale et la frontière si mince entre le bien et le mal. Et surtout Luis Tosar fait un véritable festival. Lui qui imposait déjà sa figure toute puissante dans le rôle du caïd Montoya dans Miami Vice prend ici une ampleur démesuré en incarnant Malamadre. Transformé physiquement, maniant le langage ordurier de la rue, il est juste terrifiant, incontrôlable, le genre de rôle qui peut briller dans une carrière déjà plus que respectable.

Au final Cellule 211 s'impose comme un essentiel du film de prison, l'expérience est physique, brutale, et ne laisse pas indemne par son réalisme qui trouve juste certaines limites dans un pathos parfois trop appuyé, oubliant que parfois le trop est l'ennemi du bien. Mais les réserves sont bien maigres face à la puissance redoutable de ce film sans concessions.