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Slogane-moi, roman lesbien : un pastiche qui pastisse

Publié le 12 février 2011 par Yccallmejulie

Slogane-moi, roman lesbien : un pastiche qui pastisseSous le pseudonyme de Dina Mann (deux auteures en couple dans la vie) donne à lire avec Slogane-moi l'histoire d'un triangle amoureux. Kriss, aspirante écrivain au look garçonne, roule en Yamaha et file - en retard  - passer un entretien d'embauche dans une agende de pub. Elle manque avoir un accident avec un gros 4x4 conduit par une sublime femme. Il se trouve que la dite sublime est Clara, celle qui justement cherche une assistance pour suppléer aux activités (professionnelles et extra professionnelles) d'Axelle, son associée et soon-to-be ex-femme (sorte de mante religieuse fascinante et néanmoins dangereuse qui aime le sexe extra-conjugal).

Le roman flirte avec le pastiche - j'utilise le terme de pastiche car il me semble que la démarche est de se jouer sur un ton humoristique du côté naïf des histoires d'amour à l'eau de rose. Est-ce assumé ou pas, je l'ignore. Toujours est-il que, le ton, certes travaillé et malgré quelques beaux élans stylistiques, s'empêtre dans une logorrhée, au finish, assez artificielle.

L'intrigue en elle-même est assez simple (est-ce que Kriss et Clara vont parvenir à vivre leur histoire alors qu'Axelle met tout son talent de séductrice à l'œuvre). Les auteures se concentrent sur le ton du récit. Les titres des courts chapitres sont assez croquants, pour n'en citer que quelques "Pacse moi le sel! Ou festin d'idéaux indigestes", "Cinéma scoop ou petite leçon de romantisme compliqué",  "Conchita opera".  Le phrasé enlevé est, de loin en loin, plaisant. Ainsi, l'exposition du pouvoir de séduction d'Axelle : "En pratique Axelle murmurait : "je me demande..." et le moindre neurone traînant dans les parages se faisait un devoir de participer à l'élan cosmique d'interrogation jusqu'à ce que la réponse s'élève en offrande sacrée. Axelle était un semblant de souhait et le concept même de volonté semblait redéfini pour se plier à ses critères supposés. Axelle regardait le monde comme on réinvente la géométrie des forme et l'harmonie des couleurs. Elle n'avait pas besoin d'ordonner, l'idée d'imposer son autorité ne l'effleurait évidemment pas, elle se contentait d'ajuster un regard, d'exhaler un soupir ou de tourner l'épaule d'une certaine manière et la terre ralentissait sa révolution pour s'adapter à son rythme personnel".

Malheureusement, la dimension ludique de l'écriture a tendance à tourner sur elle-même, laissant le sentiment que les auteures cherchent le mot pour le mot. Ce travers ressort d'autant plus que le roman pêche par l'absence de description, de temps de respiration. L'aperçu des personnages est trop sommaire (je n'arrive toujours pas à me faire une idée claire de ce à quoi ressemble Kriss).  Les descriptions versent dans le stéréotype : "Clara laissa son regard courir sur les vallons hérissés d'oliviers et de cyprès, les silhouettes pittoresques des campaniles qui veillaient sur la quiétude des champs courant le long des douces pentes ensoleillées". Et lorsqu'il s'agit de traiter les émotions, le récit s'empèse. Ainsi, la scène d'amour entre Kriss et Clara : "Clara parcourait ce corps tant désiré avec une attention toute particulière. Elle s'appliquait à y débusquer la moindre parcelle érogène, guidée par les soupirs langoureux et les cambrures sensibles de sa partenaire. Elle se découvrait topographe, archéologue, géologue, architecte du désir et du plaisir".

Bref, entre pastiche assumé ou roman à l'eau de rose joliment ampoulé : l'équilibre de l'ensemble laisse sur sa faim. Et, c'est dommage car le sens de l'écriture est là.


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