Dans quelques jours débutera le tournage du deuxième film de Line Beaumier “Les oubliées”. Un court métrage de 15 minutes qui présentera dans une fiction-documentaire un historique des conditions de vie des femmes lesbiennes des années 1940 à nos jours. Forte d’une première expérience en cinéma dans un film traitant de l’inceste (Le manifeste), Line Beaumier s’est prêtée à un petit jeu de questions/réponses afin de nous parler de son dernier projet cinématographique “Les oubliées” et de ses engagements communautaires.
Pouvez-vous nous présenter l’histoire et l’univers de votre film “Les oubliées” ?
Il y a deux volets aux oubliées, la première se déroule en 1940 et l’autre en 2013.
J’ai voulu raconter l’histoire de deux femmes, une hétéro mariée et l’autre lesbienne en 1940, cette période se déroule ici au Québec. À cette époque, il était impossible de s’affirmer en tant que lesbienne. Un climat de peur était instauré, la violence conjugale était omni présente, la religion et la pression sociale étaient très fortes. Même s’il y a peu de traces de ses femmes, pourtant elles existaient. Ce sont les années ou la deuxième guerre mondiale faisait rage de l’autre côté de l’atlantique les homosexuels, lesbiennes étaient déportés par train. Les lesbiennes portaient le triangle noir, les hommes le triangle rose tandis qu’ici des femmes et des hommes vivaient dans l’ombre d’une vraie vie. Les années 2013 sont plus représentatives ce que nous vivons en ce moment ici et ailleurs.
Vous exprimez un profond attachement à votre projet, pourquoi cette volonté de réaliser un court métrage mettant en avant la vie des femmes lesbiennes en 1940 ?
Parce qu’on n’en parle pas dans l’histoire, il y a peu de trace. Pourtant elles existaient mais vivaient recluses pour ne pas subir d’intimidation, voir de l’internement en psychiatrie. Les femmes en général n’avaient aucun droit, leur vie était tracée d’avance, soit elles se mariaient et avaient des enfants ou elles entraient en religion. Il y avait celles cataloguées de vielles filles, titre peu enviable. Les femmes n’étaient pas des personnes à part entière, elles étaient sous la responsabilité de leur mari, frère, père. Car sans autorisation parentale elles n’avaient pas le statut d’adulte. Elles ne pouvaient faire soigner leur enfant malade en cas d’urgence, ne pouvaient prendre aucune décision monétaire, acheter une maison. Elles étaient sous le contrôle non seulement de l’église mais aussi de leur père et ensuite mari. À cette époque, il y a eu beaucoup de cas de violence conjugale. Des femmes battues c’était chose courante puisque la police ne se déplaçait pas lors d’appel pour aider les femmes violentées. 1940 les femmes lesbiennes ou soupçonnée de l’être et qui vivaient en Europe étaient déportées par train pour être gazée. Cette violence s’apparente encore aujourd’hui dans certain pays où l’on minimise les actes commis contre la communauté LGBT.
Quel regard portez-vous sur ces moments de l’histoire peu connu de la communauté LGBT ?
C’est incroyable de réaliser qu’autant de personnes vivaient dans l’ombre, dans la peur d’être reconnu, d’être vu, d’être catalogué, d’être intimidé. Je n’aime pas cette époque qui a été gardé sous silence si longtemps. C’est quasiment comme si elle n’avait pas existé, pourtant cette période qui a précédé les autres est tout aussi importante car elle nous a aidé à obtenir ce que nous avons maintenant.
Quels messages souhaitez-vous véhiculer aux spectateurs qui pourront prochainement découvrir votre film ?
Que le combat n’est pas fini, Qu’en Russie les jeux Olympique arrivent à grand pas et qu’on a passé une loi anti-gay,. Quand on parle de la 2ième guerre mondiale on ne parle jamais des lesbiennes, presque pas des gays. Qu’ici au Québec on a beaucoup évolué car la religion est sortie des chambres à coucher. Par contre elle reste difficile ailleurs dans le monde. Il faut continuer de sensibiliser car rien n’est acquis même ici. Quand je pense qu’au États Unis le mariage pour tous n’est pas légalisé dans tous les états, que la religion y oppose une lutte parfois sauvage. Que certain État comme le Texas banalise les meurtres commis envers la communauté LGBT.